Maya Angelou, Ta-Nehisi Coates, Akwaeke Emezi… Des dizaines d’auteurs emblématiques sont désormais exclus des bibliothèques militaires américaines. Dans une décision sans précédent, révélée le 11 mai 2025, le Pentagone a exigé le retrait systématique de tous les livres liés à la diversité, au genre ou à l’antiracisme, d’ici le 21 mai.
Une politique de « nettoyage culturel » dans les rangs de l’armée
Cette directive officielle, obtenue par Associated Press, s’inscrit dans une large campagne lancée par Pete Hegseth, secrétaire à la Défense, visant à supprimer toute référence aux politiques DEI (diversité, équité, inclusion) au sein de l’armée américaine.
Signé par Timothy Dill, sous-secrétaire par intérim, le mémo affirme que
« les supports éducatifs promouvant des idéologies clivantes sont incompatibles avec la mission du Département. »
400 livres visés : de Maya Angelou à Akwaeke Emezi
Parmi les titres interdits :
- I Know Why the Caged Bird Sings de Maya Angelou,
- Between the World and Me de Ta-Nehisi Coates,
- Pet d’Akwaeke Emezi,
- The 57 Bus de Dashka Slater,
- If I Was Your Girl de Meredith Russo,
- Cemetery Boys de Aiden Thomas,
- 19 Love Songs de David Levithan,
- The Talk de Wade Hudson, salué par NPR et le New York Times.
Des ouvrages documentaires sur l’Holocauste ou les Afro-Américains durant la Seconde Guerre mondiale ont également été bannis. Les mots-clés fournis aux bibliothécaires pour filtrer les contenus : diversity, anti-racism, gender identity, white privilege, transgender, critical race theory…
Des bibliothèques militaires sous pression
Le mémo concerne non seulement les bibliothèques des bases militaires, mais aussi celles du DoDEA, réseau d’écoles géré par le Département de la Défense, qui scolarise plus de 67 000 enfants sur 11 pays, 7 États américains, Guam et Porto Rico. Plusieurs ouvrages jeunesse sont déjà retirés ou en passe de l’être.
Un comité provisoire, baptisé Academic Libraries Committee, encadrera cette purge. On ignore pour l’instant si les livres supprimés seront stockés, détruits ou rendus invisibles.
Une politique de censure qui choque auteurs, éducateurs et bibliothécaires
Des employés du DoDEA, sous anonymat, dénoncent une attaque en règle contre les identités minoritaires.
« Ils essaient vraiment de nier que les personnes trans existent. C’est écœurant », a déclaré l’un d’eux à HuffPost.
« Cette purge n’est rien d’autre qu’une tentative politique de plaire à la ligne dure du président. »
Les critères d’admission des académies militaires également modifiés
En parallèle, un second mémo impose que la race, le genre ou l’origine ethnique ne soient plus pris en compte dans les processus d’admission des écoles militaires. Seuls les mérites académiques et sportifs pourront désormais influencer les candidatures.
Un tournant idéologique : vers une armée « nettoyée » de toute diversité ?
Le secrétaire à la Défense Pete Hegseth, nommé en début d’année, ne cache pas sa vision :
« “Notre diversité est notre force” est la phrase la plus stupide de toute l’histoire militaire », a-t-il affirmé.
Dans ce climat, des milliers de ressources éducatives ont également été retirées des plateformes du Pentagone, incluant des contenus sur le 11-Septembre, la prévention du suicide, ou les violences sexuelles. Une offensive qui dépasse largement le cadre du livre.
Littérature en péril : la censure revient par la grande porte
Cette campagne du Pentagone marque un retour brutal de la censure institutionnelle, frappant de plein fouet la littérature engagée, les récits LGBTQ+, les voix minoritaires et les documentaires historiques. Ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement l’accès à des livres — c’est le droit à la complexité, à la mémoire, et à la diversité des expériences humaines.
