En début de février, l’organisation de solidarité avec la lutte palestinienne pour l’autodétermination, Bibliothécaires et archivistes en Palestine (LAP), a rendu public un rapport préliminaire. Celui-ci met en lumière les dommages infligés aux archives, bibliothèques et musées à Gaza depuis le 7 octobre 2023 par les forces armées israéliennes. Ce rapport, qui couvre la période jusqu’à janvier 2024, vise à dénoncer la destruction et le pillage, soulignant ainsi la menace pesant sur la culture et l’histoire palestiniennes.
Rapport préliminaire sur la destruction des institutions culturelles à Gaza : un cri d’alarme des Bibliothécaires et Archivistes en Palestine
Selon l’organisation, ces démolitions ont été depuis longtemps une stratégie de guerre et d’occupation visant à restreindre davantage l’autodétermination des Palestiniens. Bibliothécaires et archivistes en Palestine soulignent que les conditions actuelles à Gaza, telles que le ciblage des journalistes, les coupures fréquentes des communications et les dommages substantiels à l’environnement bâti, représentent une menace immédiate pour la sécurité. De plus, les archivistes et les bibliothécaires ont été déplacés, blessés ou tués à plusieurs reprises, ce qui aggrave encore la situation.
Le rapport, bien que nécessaire, est inévitablement incomplet étant donné la difficulté à déterminer avec précision l’état des archives, bibliothèques et musées à Gaza alors que les combats persistent. Il s’ajoute aux rapports précédemment publiés par Heritage for Peace le 7 novembre, par le Ministère palestinien de la Culture le 6 décembre 2023, ainsi que par le Groupe régional arabe du Conseil International des Monuments et Sites le 9 janvier 2024.
Le document met en relief la destruction d’institutions telles que les Archives centrales de la ville de Gaza, qui conservaient 150 ans de documents sur son histoire, ainsi que l’important Musée de Rafah. Le réseau explique que la perte de ces bibliothèques ne se limite pas seulement aux collections de livres, mais également aux efforts des bibliothécaires de Gaza pour acquérir, entretenir et rendre accessibles les matériaux de lecture malgré le blocus continu de la bande de Gaza par Israël.
Il est rappelé que dans le passé, lors de la Nakba en 1948, 30 000 livres et manuscrits ont été pillés dans les maisons palestiniennes ; lors de l’invasion du Liban par Israël en 1982, les bibliothèques et archives de l’Organisation de libération de la Palestine ont été pillées et confisquées ; et pendant la Seconde Intifada, les bibliothèques et archives ont été endommagées et ciblées à plusieurs reprises à Gaza. De plus, la destruction intentionnelle du patrimoine culturel a été reconnue comme un crime de guerre et poursuivie devant la Cour pénale internationale.
Librarians and Archivists with Palestine (LAP) est un réseau constitué de bibliothécaires, archivistes et professionnels de l’information qui se déclarent solidaires de la lutte palestinienne pour l’autodétermination. Tout professionnel de l’information partageant ces principes peut rejoindre le réseau et participer à des groupes de travail ainsi qu’à divers projets. Son conseil consultatif palestinien rassemble des représentants de bibliothèques publiques, universitaires, d’archives, de musées et d’ONG œuvrant dans divers domaines, allant des droits des prisonniers à la préservation de la mémoire culturelle.
La destruction des bibliothèques à Gaza : un lourd tribut du conflit
Parmi les bibliothèques affectées par le conflit, la Diana Tamari Sabbagh, située dans le Centre Culturel Rashad al-Shawa de Gaza, a été complètement détruite lors d’un bombardement israélien, entraînant la perte de dizaines de milliers de livres. Ce bâtiment servait également de refuge à des centaines de Palestiniens déplacés au moment de sa destruction, le 25 novembre dernier.
Le rapport initial daté du 6 décembre révèle la destruction totale de la Bibliothèque Enaim. De même, la Bibliothèque Municipale de Gaza a subi un incendie majeur le 27 novembre 2023, causant d’importants dégâts à l’édifice et mettant en péril sa collection. L’Institut de Développement Éducatif Kana’an, qui abritait une bibliothèque communautaire, ainsi que la Bibliothèque Al-Shorouq Al-Daem, ont été anéantis.
Les bibliothèques Lubbud et Al-Nahda, ainsi que la Librairie et Bibliothèque Samir Mansour à Gaza, ont été gravement endommagées, subissant des niveaux variables de destruction.
Les bibliothèques universitaires n’ont pas été épargnées par la guerre : la Bibliothèque de l’Université Islamique de Gaza a cessé d’exister depuis le 9 octobre 2023, portant un coup dur à l’enseignement supérieur dans la région. Le 18 janvier 2024, une explosion a détruit la Bibliothèque et le Musée National de l’Université Al-Israa, entraînant la perte de plus de 3000 artefacts archéologiques. La Bibliothèque de l’Université Ouverte Al-Quds à Gaza a également été endommagée.
Enfin, bien que le campus de l’Université Al-Azhar à Gaza ait été dévasté, des informations spécifiques sur l’état de la Bibliothèque Jawaharlal Nehru n’ont pas été précisées, malgré un rapport de dommages datant du 19 octobre dernier.