Ce lundi 25 octobre 2021 s’est tenue la proclamation du prix Femina 2021. Premier coup d’envoi aux proclamations des grands prix littéraires d’automne : la couronne est pour Clara Dupont-Monod. Le prix Femina étranger est remis à Ahmet Altan et lauréat du prix Femina essai est Anne Cohen-Solal. Ce dernier avait été retiré de la dernière sélection.
Proclamation du prix Femina 2021
Lundi 25 octobre, le jury du prix Femina a proclamé les trois récompenses depuis la salle des enseignes du musée Carnavalet.
Présidé par Josyane Savigneau, le prix Femina a été remis au huitième tour à Clara Dupont-Monod avec sont ouvrage S’adapter aux éditions Stock. Notons que Thomas B. Reverdy et Jean-Baptiste del Amo étaient également en course avec leurs titres respectifs Climax (aux éditions Flammarion) et Le fils de l’homme (aux éditions Gallimard).
« Cette année, nous avons eu envie de couronner une femme, a expliqué Josyane Savigneau. Il se trouve que de très bons romans de cette rentrée ont été écrits par des femmes,et ce n’est pas de la discrimination positive, on est le Femina, pourquoi aller chercher un homme ? »
Prix Femina : Un livre autobiographique pour Clara Dupont-Monod
Clara Dupont-Monod présente dans S’adapter une famille dans les Cévennes, bouleversée par la naissance d’un enfant handicapé. Elle parle de son petit frère.
« Je dédie ce prix à tous ces êtres différents qu’on ne voie pas assez, a déclaré, visiblement émue, Clara Dupont-Monod au musée Carnavalet. Je le dédie aussi à leurs frères et sœurs, tenez bon ! »
Résumé du livre
C’est l’histoire d’un enfant aux yeux noirs qui flottent, et s’échappent dans le vague, un enfant toujours allongé, aux joues douces et rebondies, aux jambes translucides et veinées de bleu, au filet de voix haut, aux pieds recourbés et au palais creux, un bébé éternel, un enfant inadapté qui trace une frontière invisible entre sa famille et les autres.
C’est l’histoire de sa place dans la maison cévenole où il naît, au milieu de la nature puissante et des montagnes protectrices ; de sa place dans la fratrie et dans les enfances bouleversées. Celle de l’aîné qui fusionne avec l’enfant, qui, joue contre joue, attentionné et presque siamois, s’y attache, s’y abandonne et s’y perd. Celle de la cadette, en qui s’implante le dégoût et la colère, le rejet de l’enfant qui aspire la joie de ses parents et l’énergie de l’aîné. Celle du petit dernier qui vit dans l’ombre des fantômes familiaux tout en portant la renaissance d’un présent hors de la mémoire.
Comme dans un conte, les pierres de la cour témoignent. Comme dans les contes, la force vient des enfants, de l’amour fou de l’aîné qui protège, de la cadette révoltée qui rejettera le chagrin pour sauver la famille à la dérive. Du dernier qui saura réconcilier les histoires.
La naissance d’un enfant handicapé racontée par sa fratrie.
Un livre magnifique et lumineux.
Prix Femina étranger remis à Ahmet Altan
Concernant le prix Femina étranger c’est Ahmet Altan qui a été récompensé dès le premier tour avec son ouvrage Madame Hayat traduit par Julien Lapeyre de Cabanes aux éditions Actes Sud.
Écrivain et journaliste, Ahmet Altan a écrit ce roman en prison. Arrêté en septembre 2016, il avait été condamné à la prison à vie en février 2018 pour “tentative de renversement de l’ordre constitutionnel“. Rejugé après une première annulation de son procès par la cour de cassation, il avait été condamné en novembre 2019 à 10 ans et demi de prison. I
Il a été remis en liberté le 14 avril. Dans une vidéo de remerciement adressé au Femina, Ahmet Altan a dédié ce « prix à toutes les femmes turques et kurdes injustement emprisonnées, pour des raisons politiques, au cours de ces années passées avec Madame Hayat. (…) Je voudrais que comme Madame Hayat, aussi longtemps qu’elle sera libre, ces femmes puissent respirer le parfum de la liberté ».
Résumé du livre
Une histoire d’amour magnifique, celle d’un jeune homme pour une femme d’âge mûr qui éclaire et modifie son regard sur le sens de la vie. Un livre où la littérature, premier amour de ce garçon, devient vitale. Car dans une ville où règne l’effroi, seul l’imaginaire sauve de l’enfermement…
Le prix Femina essai remis à Annie Cohen-Solal
Le prix Femina essai a quant à lui été remis à Annie Cohen-Solal avec son essai Un étranger nommé Picasso. Ce livre avait été retiré de la dernière sélection. L’auteure a aussi dirigé Picasso l’étranger, catalogue de l’exposition qui s’ouvre au Musée de l’histoire de l’immigration le 4 novembre. Fayard, en coédition avec le Musée Picasso et le Musée de l’histoire de l’immigration, sortira l’ouvrage le 3 novembre.
Résumé du livre
Pourquoi le 18 juin 1901 Picasso est-il « signalé comme anarchiste » à la Préfecture de police, quinze jours avant sa première exposition parisienne ? Pourquoi le 1er décembre 1914 près de sept cents peintures, dessins et autres œuvres de sa période cubiste sont-ils séquestrés par le gouvernement français pour une période qui dure près de dix ans ? D’où vient l’absence presque totale de ses tableaux dans les collections publiques du pays jusqu’en 1947 ?
Comment expliquer, enfin, que Picasso ne soit jamais devenu citoyen français ? Si l’œuvre de l’artiste a suscité expositions, ouvrages et commentaires en progression exponentielle à la hauteur de son immense talent, la situation de Picasso « étranger » en France a paradoxalement été négligée. C’est cet angle inédit qui constitue l’objet de ce livre.
Pour l’éclairer, il faut exhumer des strates de documents ensevelis, retrouver des fonds d’archives inexploités, en rouvrir, un à un, tous les cartons, déplier chacune des enveloppes, déchiffrer les différentes écritures manuscrites. Alors tout s’organise autrement et le statut de l’artiste se révèle beaucoup plus complexe qu’on ne l’imaginait.
Un étranger nommé Picasso nous entraîne dans une enquête stupéfiante sur les pas de l’artiste surdoué, naviguant en grand stratège dans une France travaillée par ses propres tensions. On le voit imposer au monde son œuvre magistrale, construire ses propres réseaux et devenir un puissant vecteur de modernisation du pays. Un modèle à contempler et peut-être à suivre.