En dépit de leur classement sans suite en 2022, deux accusations d’entente entre Amazon et les cinq principaux éditeurs américains sur les prix des livres resurgissent. Notamment, l’accusation liée aux tarifs des livres numériques a été révisée et agrémentée de nouveaux éléments, suscitant ainsi l’intérêt des autorités judiciaires américaines.
Deux première plaintes rejetées
En janvier et en mars 2021, le cabinet d’avocats Hagens Berman avait déposé deux plaintes devant les tribunaux américains. La première accusation visait Amazon et cinq grands éditeurs, notamment Hachette, HarperCollins, Macmillan, Simon & Schuster, et Penguin Random House, pour une entente présumée sur les prix des livres numériques. La seconde portait sur les conditions de vente en ligne des livres imprimés et les prix de gros accordés aux revendeurs.
En septembre 2022, la justice américaine avait rejeté ces deux plaintes. Le juge fédéral Gregory Woods avait suivi l’avis de la juge d’instruction Valerie Figueredo, qui considérait que les termes contractuels des acteurs en question n’étaient pas illégaux en eux-mêmes et ne constituaient pas de preuves directes d’un complot visant à fixer les prix des livres numériques et éliminer la concurrence. La plainte concernant les livres imprimés avait également été rejetée.
Malgré cela, le juge Woods avait laissé la possibilité aux plaignants de modifier leurs procédures et de les soumettre à nouveau à la justice.
Saisissant cette opportunité, le cabinet Hagens Berman avait présenté un nouveau réquisitoire en novembre 2022, se concentrant spécifiquement sur l’entente présumée autour des prix des livres numériques. Ce terrain avait déjà été l’objet d’un procès contre Apple en 2011, où Hachette, HarperCollins, Simon & Schuster, Penguin et Macmillan étaient également cités. Apple avait été condamnée à rembourser 400 millions de dollars aux consommateurs, tandis que les éditeurs avaient accepté un accord de 166 millions de dollars avec la justice.
La position dominante d’Amazon
Selon le plaignant, Amazon aurait utilisé sa position dominante sur le marché des livres numériques pour “contraindre” les éditeurs à accepter des termes contractuels restreignant la concurrence en matière de prix et de disponibilité des articles. Le cabinet d’avocats affirmait que cette entente, plutôt forcée pour les éditeurs, permettait à Amazon d’accroître ses marges tout en évinçant la concurrence. En conséquence, les consommateurs auraient été lésés, car les prix des livres numériques auraient été artificiellement maintenus à un niveau déterminé par Amazon.
Les éditeurs sont une fois de plus épargnés par cette plainte amendée, qui est soumise à nouveau à la juge d’instruction Valerie Figueredo. Celle-ci évalue la crédibilité et la solidité des arguments avancés par les plaignants et reconnait qu’ils ont présenté de manière adéquate des preuves d’un comportement anticoncurrentiel soutenant leurs allégations de monopole et de tentative de monopole. Elle considère la situation décrite comme “plausible” et accorde du crédit aux allégations dirigées contre Amazon.
Un manque de preuves
Cependant, son avis général sur la plainte n’a pas véritablement changé. Elle estime toujours que la théorie d’une “conspiration” ou d’une “entente” entre Amazon et les éditeurs, ainsi qu’entre les éditeurs eux-mêmes, manque de preuves suffisantes de la part des plaignants.
Au cœur de la procédure restent les clauses de “nation la plus favorisée”, qui garantissent à un revendeur qu’il bénéficiera toujours des conditions les plus avantageuses proposées par un fournisseur. Amazon maintient sa position, affirmant que ces clauses ne sont pas “intrinsèquement anticoncurrentielles”, et qu’aucune preuve ne soutient l’idée que l’entreprise aurait participé à une élévation des niveaux de commissions sur les ventes de livres numériques à des niveaux anticoncurrentiels.
Le juge fédéral Gregory Woods devra maintenant examiner la nouvelle plainte, en prenant en compte l’avis de la juge Figueredo.