Rachida Dati envisage de réformer le Pass Culture en réévaluant ses conditions d’utilisation et ses bénéficiaires. L’examen parlementaire du projet de loi de finances 2025 lui permettra de se pencher à nouveau sur cette question, mais le budget global sera probablement également discuté. En effet, la société en charge de la gestion du Pass constitue un aspect particulièrement coûteux du dispositif…
Vers une réforme du Pass Culture : Équilibre et égalité en ligne de mire
Trois ans après sa généralisation pour tous les jeunes de 18 ans, le Pass Culture a déjà subi des évolutions significatives. Les crédits accordés aux bénéficiaires sont passés de 500 € à 300 €, tandis que le dispositif a été élargi à d’autres tranches d’âge, incluant une part collective à utiliser avec les enseignants pour financer des activités intégrées dans le programme d’Éducation artistique et culturelle (EAC).
Malgré tout, le budget total reste important : il était de 267,5 millions d’euros dans le cadre des missions du ministère de la Culture pour 2024, alors que seulement 107,5 millions d’euros étaient alloués à l’éducation artistique et culturelle. Dans le projet de loi de finances 2025, le dispositif pourrait subir les conséquences de la prochaine cure d’austérité, avec des autorisations d’engagement et des crédits de paiement réduits à 210,5 millions d’euros et 102,7 millions d’euros pour l’EAC.
Rachida Dati a récemment reconnu que le Pass Culture, une mesure emblématique des mandats d’Emmanuel Macron, nécessitait des ajustements. Elle a souligné, lors d’une audition devant la commission des finances de l’Assemblée nationale, que « ce qui manque au Pass Culture, c’est la médiation ». Les critiques concernant le dispositif sont anciennes, remontant à ses débuts, lorsque des députés de l’opposition dénonçaient une initiative principalement axée sur la consommation, avec un accompagnement minimal pour les bénéficiaires.
Des questions sur les inégalités socio-économiques et l’accès inégal à l’offre culturelle sur le territoire, ainsi que sur le coût de cette mesure pour les finances publiques, ont été soulevées. La réforme souhaitée par Rachida Dati vise à aborder certains de ces enjeux. Dans une tribune publiée dans Le Monde, elle a déclaré : « Sans renoncer à l’universalité du dispositif, nous devons davantage assumer que le Pass Culture a vocation à corriger des inégalités de destin ».
Ainsi, les montants alloués seraient différenciés en fonction des niveaux socio-économiques, bien que les critères précis restent à définir. De plus, les bénéficiaires pourraient être soumis à des contraintes concernant l’utilisation de leur crédit, une partie étant réservée au spectacle vivant, selon les suggestions de la ministre de la Culture. Par ailleurs, la part collective du Pass, utilisable en collaboration avec les enseignants, serait également augmentée.
Le Pass Culture : Une “Start-Up d’état” au cœur de la gestion publique
Depuis ses débuts, le Pass Culture est administré par une « start-up d’État ». Ce terme désigne la SAS Pass Culture, entièrement financée par des fonds publics et co-propriété de l’État et de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC). Bien que cette entité ne dispose d’aucune ressource propre et soit totalement financée par l’État, elle n’apparaît pas sur la liste des opérateurs, ce qui entrave la transparence concernant ses actions et résultats.
La création du Pass Culture et de sa SAS a été marquée par une certaine précipitation, en lien avec les promesses électorales d’Emmanuel Macron. Cette urgence a été faite « sans tenir compte de la traçabilité des procédures et des réalisations, ce qui a fragilisé le dispositif », comme l’a souligné la Cour des Comptes dans un rapport.
L’utilisation de deux consultants extérieurs a également suscité des interrogations au sein de la juridiction financière, notamment en raison des coûts engendrés. La Cour a constaté que « le pilotage du Pass Culture, durant sa première phase, illustre les dérives liées à un recours excessif à des consultants extérieurs pour des missions d’ordre administratif et politique ».
La SAS Pass Culture : Des dépenses publiques en hausse
La SAS Pass Culture est à nouveau sous le feu des critiques concernant les dépenses publiques qu’elle engendre. Selon L’Informé, le loyer du siège de la start-up a atteint 1,2 million d’euros en 2023, suite à un déménagement dans le 8e arrondissement de Paris, près de l’avenue des Champs-Élysées. Une porte-parole de la SAS a expliqué que « les anciens locaux étaient devenus trop petits », ajoutant que la nouvelle location visait à optimiser le nombre de postes grâce à l’intégration du flex office.
L’Informé souligne également une augmentation significative des effectifs, passant de 130 à 166 employés, ainsi qu’une hausse des salaires de 41 %, totalisant 10,35 millions d’euros. De plus, les frais de restauration ont crû de 71 %, atteignant 59 000 euros, tandis que les dépenses de déplacement ont augmenté de 45 %, pour un montant de 168 000 euros. La SAS justifie ces dépenses par la réintégration de missions auparavant confiées à des prestataires externes, par des revalorisations salariales et par la couverture d’événements culturels plus fréquents et diversifiés sur le territoire.
Enfin, la communication entourant le Pass Culture, gérée par l’agence Havas du groupe Vivendi, a coûté 524 000 euros en 2023, marquant une augmentation de 16,8 % par rapport à l’année précédente. Ce coût supplémentaire serait attribué à des campagnes plus ciblées, jugées donc plus efficaces.