En 2025, une solution incontournable pour le secteur de l’édition disparaîtra. Pour soutenir éditeurs et libraires dans l’expédition d’ouvrages à travers le monde, une tarification préférentielle était en place. Mais La Poste met un terme à cette mesure : le tarif “Livres et Brochures” prendra fin le 1er juillet.
Fin du tarif Livres et Brochures : un coup dur pour le rayonnement de la culture française
Le site ActuaLitté l’avait révélé en novembre dernier : après 22 ans d’existence, la tarification spéciale “Livres et Brochures”, qui favorisait l’envoi international pour les particuliers, entreprises et associations, va disparaître. Conçue pour soutenir le « rayonnement de la culture française », cette solution est jugée trop coûteuse par La Poste, bien qu’aucune évaluation précise n’ait été communiquée. Sa suppression interviendra dans cinq mois.
Déjà, en 2018, une révision des prix avait suscité des inquiétudes. À l’époque, le ministre de la Culture, Franck Riester, avait relativisé la hausse, estimant que les tarifs restaient « très abordables ». Pourtant, les augmentations étaient significatives, et Bercy rappelait en 2017 que « le maintien des offres avantageuses pour l’envoi de livres nécessitait des efforts financiers partagés ».
Une fin annoncée en deux étapes
Selon des opérateurs logistiques, La Poste aurait commencé à informer ses clients tardivement, et certains signalent déjà des retours massifs de colis sans explications claires. Officiellement, l’arrêt se fera en deux temps : dès janvier 2025 pour les sacs postaux, puis au 1er juillet 2025 pour la suppression définitive du tarif.
Face à cette décision, plusieurs acteurs tentent de mobiliser. La journaliste et autrice Judith Lossman, à travers une pétition, dénonce un manque total de transparence : « Personne, même en haut lieu à La Poste, ne semble pouvoir justifier cette suppression. On évoque une décision liée à une réduction de subvention. » Elle interpelle Rachida Dati et plaide pour une action immédiate afin de préserver ce tarif essentiel pour de nombreuses familles, PME culturelles, auteurs et autrices.
Un impact massif pour le secteur
La disparition de ce tarif a des conséquences majeures : « Pour un livre de 600 g, le tarif passera de 1,74 € (jusqu’au 31 décembre 2024) à 5,65 € entre janvier et juin 2025, pour atteindre 37,30 € au 1er juillet, soit une augmentation de 600 % », détaille Judith Lossman dans son appel.
Bien que le tarif “Livres et Brochures” ne soit pas une obligation juridique pour La Poste, il représentait un soutien crucial pour le secteur de l’édition. Cependant, La Poste justifie sa décision par la nécessité de réduire le déficit engendré par cette offre. En l’absence d’une intervention politique forte, il semble peu probable que cette suppression soit annulée.
Un secteur en alerte
Des voix, comme celles de la Fédération des éditions indépendantes, de l’association L’Autre Livre ou encore du libraire Philippe Mesnard, s’élèvent pour dénoncer une « démission » de La Poste. Mais l’interprofession peine à trouver des solutions face à une décision unilatérale.
Pour soutenir cette mobilisation, la pétition de Judith Lossman est disponible en ligne.
Les parlementaires dénoncent l’impact de la suppression du tarif Livres et Brochures sur l’édition indépendante
Les parlementaires ont également fait entendre leur voix auprès de la rue de Valois. Jean-Raymond Hugonet (Essonne — Les Républicains) exprimait, 15 jours après notre article, sa préoccupation face à une situation floue : « Si l’État n’a pas voix au chapitre dans la décision, il est regrettable de voir la compétitivité des acteurs français de l’édition se détériorer à l’international, alors qu’elle est déjà affectée par la concurrence des plateformes en ligne. »
Un mois plus tard, Jérôme Darras (Pas-de-Calais — SER) renforçait cette analyse, soulignant : « Cette décision aura des conséquences considérables pour les libraires et éditeurs indépendants, entraînant des coûts supplémentaires importants, alors que les grandes plateformes en ligne offrent souvent des livraisons gratuites ou à faibles coûts. »
D’autres parlementaires ont emboîté le pas, comme Richard Ramos (Loiret — Les Démocrates), qui insistait auprès de Rachida Dati : « L’arrêt de ce dispositif est un coup dur pour les éditeurs, notamment pour l’édition indépendante, car il entraînera des frais supplémentaires. »
Clémentine Autain (Seine-Saint-Denis — Écologiste et Social), David Guerin (Seine-Maritime — Horizons & Indépendants) et Hendrik Davi (Bouches-du-Rhône — Écologiste et Social) se sont tournés vers le ministère de l’Économie : « Encore une fois, La Poste n’a plus les moyens d’assurer sa mission de service public en raison de l’absence de compensation de l’État », soulignait Clémentine Autain.
Les deux autres députés ont pointé les dangers de cette décision : « Cela semble d’autant plus incompréhensible sachant que des plateformes en ligne comme Amazon contournent les frais d’expédition via les points relais et proposent des prix difficiles à concurrencer. » À suivre…