Dans sa lettre de janvier-février 2025, la Bibliothèque interuniversitaire Sorbonne (BIS) exprimait son inquiétude face au nouveau budget de l’université Paris I Panthéon-Sorbonne, dont elle dépend. Une réduction de 23 % par rapport à la demande initiale était envisagée, cette dernière étant déjà inférieure d’environ 5 % au budget de 2024. Finalement, la baisse atteint 40 %…
Coupes budgétaires : la BIS contrainte de réduire ses services
Face à une forte baisse de son budget, la Bibliothèque interuniversitaire Sorbonne (BIS) annonce une réduction drastique de ses activités et services. « Nous sommes donc contraints de réduire la plupart de nos activités et services (conservation, achats de monographies, abonnements de périodiques…) », indique-t-elle dans un message. Une première conséquence immédiate : « À partir de ce lundi 17 février, le service du Prêt entre bibliothèques (PEB), fournisseur et demandeur, est suspendu pour une durée indéterminée. Seules les demandes déjà en cours seront traitées. »
Des répercussions sur les collections
Le 6 décembre dernier, le conseil d’administration de l’université Paris I Panthéon-Sorbonne avait adopté un budget initial pour la BIS, mais celui-ci n’a pas été validé par le recteur de région académique et chancelier des universités, Bernard Beignier, rendant son exécution impossible.
Un budget révisé, présenté lors du conseil d’administration du 16 janvier, prévoyait déjà une baisse de 23 % par rapport à la demande initiale, elle-même inférieure d’environ 5 % au budget de 2024. Cependant, cette nouvelle proposition n’a pas été approuvée non plus.
Finalement, l’université dispose depuis le 31 janvier d’un budget exécutoire pour 2025, fixé par le rectorat après un rejet de la dernière proposition budgétaire. Celui-ci entraîne une réduction de 13,36 millions d’euros par rapport au budget approuvé initialement en décembre.
Dans l’attente du vote du budget national, la BIS doit limiter ses dépenses aux besoins essentiels pour assurer sa continuité. Ainsi, elle ne disposait que de 445 000 € pour couvrir les deux premiers mois de 2025, alors qu’au 15 février 2024, plus de 780 000 € avaient déjà été engagés, notamment pour les abonnements. Une situation qui risque d’affecter durablement la qualité des services et l’accès aux ressources documentaires.
Coupes budgétaires : la BIS contrainte à des choix drastiques
Avant même l’annonce de la réduction finale de 40 % de son budget, la direction de la Bibliothèque interuniversitaire Sorbonne (BIS) anticipait déjà des coupes importantes et travaillait à établir des priorités.
« Une fois retranchées les dépenses obligatoires (locations au Centre Technique du Livre de l’Enseignement Supérieur (CTLes), charges liées à l’implantation en Sorbonne, dépenses fléchées liées à des subventions), nous devrons, comme bien d’autres bibliothèques universitaires actuellement, faire porter ces coupes sur l’achat, la conservation ou la communication (PEB, accès aux collections distantes conservées au CTLes) des collections courantes des deux sites de la BIS (Sorbonne et bibliothèque de géographie), les dépenses patrimoniales, la valorisation (numérisation), le catalogage, et les actions culturelles, pour ne citer que les principaux », détaillait-elle.
Face à l’ampleur de ces restrictions, la direction alertait : « L’étendue des coupes à effectuer est telle qu’elles affecteront nos services aux usagers et auront des répercussions sur les collections. »
Un impact immédiat sur les services
Confrontée à une baisse presque deux fois plus importante que prévue, la BIS a été contrainte de prendre des mesures radicales. « Compte tenu de la richesse des collections de la BIS et du nombre de demandes comptabilisées en 2024, nous sommes bien conscients des conséquences de l’arrêt de ce service sur nos usagers et vous remercions pour votre compréhension quant à la décision difficile que nous avons dû prendre », expliquait-elle.
Sollicitée par ActuaLitté pour commenter l’impact de cette réduction budgétaire, la bibliothèque n’a pas donné suite aux demandes d’information, tout comme l’université Paris I Panthéon-Sorbonne, qui n’a pas communiqué sur la répartition de son budget.
Mobilisation face aux restrictions budgétaires
Le 2 février, Nathalie Drach-Temam, présidente de Sorbonne Université, exprimait sa « profonde inquiétude face aux sévères restrictions budgétaires qui frappent depuis plusieurs années l’enseignement supérieur et la recherche ». Elle dénonçait une situation où « l’État se défausse sur [les universités] des conséquences financières de ses politiques », entravant leur mission de service public.
Malgré un appel solennel aux pouvoirs publics, le budget alloué aux universités a finalement été réduit d’un milliard d’euros par rapport à 2024, s’établissant à 31,3 milliards d’euros. En réaction, le 11 février, des manifestations étudiantes ont éclaté sous le slogan « Plus de sous, bloquons tout ! ». À l’initiative de L’Union étudiante et de l’UNEF, des centaines d’étudiants se sont mobilisés à Nantes, Rennes, Angers, Tours, Paris, Grenoble, Lyon, Aix-Marseille, Nancy, Reims et Lille. Une intersyndicale incluant la FSU, la CGT, SUD et l’UNSA a également rassemblé environ 500 personnes place du Panthéon à Paris.
Alors que 60 universités sur 75 ont adopté un budget en déficit, la situation se dégrade : plus de 30 000 places en licence et master seront supprimées à la rentrée 2025, et certaines bibliothèques universitaires, voire des sites entiers, pourraient fermer, alerte L’Union étudiante dans un communiqué relayé par Le Monde.
Spécialisée en sciences humaines et sociales, la BIS conserve un fonds patrimonial d’exception, comprenant manuscrits, estampes et imprimés anciens. Partenaire du réseau CollEx-Persée, elle met aussi en valeur ses collections à travers expositions et numérisation via sa bibliothèque en ligne, NuBIS. Des missions aujourd’hui menacées par ces restrictions budgétaires inédites.